borisehret.ch - Jean-Paul Sartre: Le Mur

L'existentialisme athée

L'existentialisme constitue une réflexion profonde sur la condition humaine. Pour Sartre, le principe fondamental est que l'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait lui-même.

Dostoïevski avait écrit : « Si Dieu n'existait pas, tout serait permis ». Sartre pousse cette intuition à son terme : puisque Dieu n'existe pas, tout devient effectivement possible pour l'être humain.

À la naissance, les êtres humains sont semblables à une page blanche. Il n'existe aucun destin a priori, aucune essence prédéterminée, car il n'y a pas de Dieu pour la concevoir. Les hommes doivent donc se définir eux-mêmes et donner un sens à leur existence. Pour l'humanité, l'existence précède l'essence.

Cette formule s'oppose à la logique des objets manufacturés : une carafe, par exemple, a été conçue par son créateur dans un but précis – contenir de l'eau. Son essence (sa fonction) est donc définie avant même qu'elle n'existe matériellement.

La liberté comme condamnation

Un autre concept central de la pensée sartrienne est celui de la liberté. En l'absence de Dieu et de tout destin préétabli, l'être humain se trouve contraint de faire des choix et de définir ses propres valeurs. Il devient ainsi entièrement responsable de lui-même et, par extension, des autres. Selon Sartre, nous nous définissons par nos actions et « nous sommes condamnés à être libres ». Reconnaître cette liberté implique d'accepter la responsabilité totale de nos actes.

Cette responsabilité nous oblige à créer notre propre conception du sens de l'existence et à vivre selon nos valeurs personnelles, plutôt que de nous contenter de suivre aveuglément les normes imposées par la société.

La mauvaise foi

Sartre a également théorisé la notion de mauvaise foi, qui survient lorsque nous nions notre propre liberté en nous réfugiant dans des rôles sociaux ou des conventions établies. Cette fuite permet d'éviter les décisions difficiles et l'angoisse inhérente à notre condition d'êtres libres.

Le regard d'autrui

En l'absence de Dieu pour juger nos vies – comme ce serait le cas dans une conception catholique –, et face aux limites de notre propre jugement souvent biaisé par la mauvaise foi, nous avons besoin du regard des autres. Autrui peut certes nous limiter, nous juger et tenter de nous définir, mais sa présence demeure indispensable à notre compréhension de nous-mêmes et du monde. À travers son regard, nous devenons soudain un « objet » susceptible d'être évalué et jugé. Cette objectification peut, elle aussi, devenir source d'angoisse et de malaise.

L'engagement intellectuel

Pour Sartre, un philosophe authentique doit être un intellectuel engagé. Il dit: « Un intellectuel, pour moi, c'est quelqu'un qui est fidèle à un ensemble politique et social, mais qui ne cesse de le contester. »